Suppléments de vitamine D et prévention des fractures
Suppléments de vitamine D et prévention des fractures
Dr Adrian Lau, Dre Rowena Ridout, Dre Claudia Gagnon, Dre Zahra Bardai, Dre Emma Billington et Dre Wendy Ward.
Recommandations de l’équipe d’intervention rapide d’Ostéoporose Canada.
Meryl S. LeBoff et collègues (1) publiaient récemment les résultats d’une étude auxiliaire à l’essai (VITAL) sur la prise de vitamine D et d’oméga-3, arrivant à la conclusion que les suppléments de vitamine D3 à raison de 2000 U.I. par jour ne réduisaient pas de façon significative les risques de fractures par rapport au placébo chez les adultes d’âge moyen ou plus âgés qui sont en santé dans l’ensemble.
Dans un éditorial rédigé à la suite de ces résultats, les docteurs Cummins et Rosen (2) ont suggéré que les « intervenants devaient cesser de mesurer les taux de 25-hydroxyvitamine D ou de recommander la supplémentation en vitamine D, et que les personnes devraient arrêter de prendre des suppléments de vitamine D pour prévenir des maladies sévères ou pour prolonger la vie. »
Ces articles ont soulevé des questions au sein de la communauté concernée par l’ostéoporose, soit les professionnels de la santé, les patients et les proches aidants. Les patients atteints d’ostéoporose ou ayant subi des fractures de fragilisation devraient-ils continuer de prendre des suppléments de vitamine D3? Leurs taux de vitamine D devraient-ils être vérifiés?
Les risques médicaux pour une personne souffrant d’une affection qui justifierait la surveillance et la supplémentation de vitamine D devraient être évalués avec grand soin.
Important à noter : les participants à cette étude étaient représentatifs de la population générale américaine; par conséquent, les résultats et recommandations pourraient s’appliquer ou pas aux patients atteints d’ostéoporose, ayant subi des fractures ou à risque de souffrir d’une carence importante en vitamine D. Selon la base de référence, quelque 10 % des participants à cette étude avaient subi des fractures de fragilisation et moins de 5 % prenaient des médicaments pour traiter l’ostéoporose.
Quelque 42 % des participants prenaient déjà des suppléments de vitamine D avant le début de l’étude. Si les participants du groupe placébo étaient randomisés (contrairement à ceux du groupe recevant 2000 U.I. de vitamine D), ils avaient néanmoins le droit de continuer de prendre de la vitamine D jusqu’à concurrence de 800 U.I. par jour. À titre de référence, le taux de 25-hydroxyvitamine D était de 30 ng/mL, ou de 75 nmol/L, soit la cible selon les lignes directrices en vigueur. Tandis qu’il n’a pas été démontré que la vitamine D prévienne les fractures dans ce groupe d’étude, l’effet de la supplémentation en vitamine D ne peut être généralisé à des patients atteints d’ostéoporose étant donné qu’ils présentent un risque plus élevé de subir des fractures.
Que devrions-nous faire au sujet de la vérification du taux de vitamine D?
Actuellement, soumettre la population générale à des examens pour déterminer le taux de 25-hydroxyvitamine D n’est pas prescrit (3). Toutefois, certaines situations précises peuvent justifier un test de vitamine D à des fins cliniques. Par exemple, des patients présentant des comorbidités qui ont un effet sur l’absorption et le métabolisme de la vitamine D bénéficieraient de tels examens, car ils permettent de déceler les taux de 25-hydroxyvitamine D particulièrement faibles et de doser correctement la supplémentation en vitamine D. Ces comorbidités comprennent le syndrome de malabsorption, des maladies rénales, les conditions de vie dans le cadre d’établissements et la prise de certains médicaments qui touchent au métabolisme de la vitamine D. Des tests de laboratoire peuvent aussi s’avérer utiles avant d’entamer la prise d’inhibiteurs de la résorption osseuse dans le cadre d’un traitement de l’ostéoporose, étant donné que des taux bas de 25-hydroxivitamine D peuvent constituer un facteur de risque pour l’hypocalcémie.
Que devrions-nous faire au sujet des suppléments de vitamine D?
Nous encourageons nos patients atteints d’ostéoporose à continuer de prendre leurs suppléments de vitamine D, selon les Lignes directrices d’Ostéoporose Canada en vigueur (4) et selon leurs besoins cliniques personnels. Comme peu d’aliments contiennent de la vitamine D, Santé Canada recommande à tous les Canadiens de plus de 50 ans de prendre de la vitamine D à raison de 400 U.I. par jour (5). De plus, la plupart des essais pharmacothérapeutiques procurent aux participants au moins 400 U.I. par jour de vitamine D. Les patients devraient discuter de leurs besoins en vitamine D avec les professionnels de la santé qui les suivent avant de modifier leur routine.
Références
- LeBoff, M.S., S.H. Chou, K.A. Ratliff, N.R. Cook, B. Khurana, E. Kim, P.M. Cawthon, D.C. Bauer, D. Black, J.C. Gallagher, I. Lee, J.E. Buring et J.E. Manson, « Supplemental Vitamin D and Incident Fractures in Midlife and Older Adults », New England Journal of Medicine, 2022; 387(4) : p. 299-309.
- Cummings, S.R. et Rosen C., « VITAL Findings — A Decisive Verdict on Vitamin D Supplementation », New England Journal of Medicine, 2022; 387(4) : p. 368-370.
- Lindblad, A.J., S. Garrison et J. McCormack, « Testing vitamin D levels », Canadian Family Physician, 2014; 60(4) : p. 351.
- Papaioannou, A., S. Morin, A.M. Cheung, S. Atkinson, J.P. Brown, S. Feldman, D.A. David A. Hanley, A. Hodsman, S.A. Jamal, S.M. Kaiser, B. Kvern, D. Siminoski et W.D. Leslie, « 2010 clinical practice guidelines for the diagnosis and management of osteoporosis in Canada: summary », CMAJ, 2010; 182(17) : p. 1864-1873.
- https://www.canada.ca/fr/sante-canada/services/aliments-nutrition/saine-alimentation/vitamines-mineraux/vitamine-calcium-revision-apports-nutritionnels-reference.html
Conseil consultatif scientifique
L’équipe d’intervention rapide d’Ostéoporose Canada, composée de membres du Conseil consultatif scientifique, crée des énoncés de principe dès que des nouvelles sont diffusées au sujet de l’ostéoporose. Ces énoncés de principe servent à informer à la fois les professionnels de la santé et les patients. Les membres du Conseil consultatif scientifique (CCS) sont des bénévoles experts des domaines de l’ostéoporose et du métabolisme osseux.